Paris, 8 septembre 2018
Considérez-vous que le salon, qui fête ses 17 ans ce mois-ci, a atteint l’âge de maturité ? Cherchez-vous encore à l’enrichir de nouvelles perspectives ?
Je suis très fier de la notoriété actuelle du Parcours des mondes. Quand nous l’avons repris, il y a de cela plusieurs années, l’événement était sur la pente descendante. Avec le temps et beaucoup de passion, nous avons travaillé pour lui donner le visage qu’il a aujourd’hui, en sélectionnant les participants parmi les meilleures galeries du monde, ce qui n’est pas évident du fait qu’il y en a très peu. Ça peut paraître paradoxal, mais il faut savoir que dans le monde, il y a une centaine de galeries d’art tribal de premier plan, pas plus. À titre de comparaison, si vous prenez le moindre immeuble du quartier de Chelsea à New York, vous en trouverez autant, si ce n’est plus, sur l’art contemporain. En clair, nous vivons dans un microcosme à l’intérieur duquel nous offrons ce qui se fait de mieux. Cette année, nous avons refusé une vingtaine de participants potentiels, en raison de la qualité des œuvres, primordiale à nos yeux, mais aussi du fait du nombre de galeries allouées à l’événement, qui n’est pas extensible à l’infini. En fait, je pense sincèrement que nous avons atteint notre vitesse de croisière, avec un format que nous maîtrisons, grâce aux trois personnes qui travaillent à temps complet sur l’événement. Je ne vois pas trop ce qu’on pourrait faire de mieux, si ce n’est qu’on essaie depuis quelques années d’élargir le salon à l’art asiatique, car il y a énormément de demande. Mais c’est une niche que nous connaissons moins bien que les arts africain et océanien, c’est pourquoi nous restons encore prudents.
Quel est le fil conducteur des expositions thématiques concoctées cette année ?
Il est toujours délicat de mettre en place un fil rouge. Même si nous sommes au courant du contenu de certaines expositions, ce n’est pas le cas de toutes. Souvent, les marchands, qui prennent beaucoup de temps à les préparer, hésitent, valident, puis modifient, voire font parfois machine arrière dans leurs choix. Par conséquent, le contenu de certaines expositions n’est connu qu’à la dernière minute, juste avant l’ouverture. En ce qui nous concerne, de toute manière, nous ne donnons aucune directive aux marchands. J’estime normal qu’ils aient la main sur ce qu’ils veulent exposer et vendre. Pour autant, cela ne veut pas dire que nous ne sommes pas vigilants. Bien au contraire. Avant le lancement du salon, nos six experts internationaux qui s’occupent du vetting contrôlent une à une, la qualité et l’authenticité de chaque pièce présentée sur le salon, y compris celles des expositions thématiques. Quand nous avons une opinion défavorable sur l’une, un doute, des justificatifs sont demandés, voire son retrait. C’est déjà arrivé.
On entend parfois que le Parcours des mondes est une affaire d’initiés fortunés. Qu’en pensez-vous ?
Personnellement, l’argent n’est pas un critère qui compte. Ce qui me plaît, ce qui me motive à continuer dans cette aventure, c’est l’esthétique, l’originalité et la provenance des pièces que l’on peut découvrir sur le salon. Sur le Parcours des mondes, il y en a pour toutes les bourses. J’ai vu ici ce que j’estime être des chefs d’œuvres partir à 12.000 €. Dans le même temps, si certains grands collectionneurs ou en passe de l’être veulent débourser un million d’euros, ils peuvent le faire, sans souci. Pour résumer, tout est possible. Mais il faut savoir que la tendance est plutôt à un tassement des prix, du fait de la concurrence actuelle des salles de ventes.
Les marchands manifestent-ils une satisfaction à être présents sur l’événement ?
Vous savez, par définition, les marchands ne sont jamais enthousiastes, et ne donnent jamais leur chiffre d’affaires. Il est donc difficile de se faire une idée précise. Ceci dit, à chaque fin d’édition, nous menons une petite enquête de satisfaction auprès d’eux et il ressort que chaque année, de nouveaux clients se présentent sur le salon. Parcours des mondes est aujourd’hui un événement attendu dans le monde entier. On y voit des gens qui viennent de toute l’Europe, mais aussi des États-Unis, d’Australie, de Nouvelle-Zélande... On croise aussi des Chinois, des Russes, des Japonais. Dans l’ensemble, on sait que les affaires fonctionnent. Deux chiffres me permettent de l’affirmer. D’une part, certains marchands font jusqu’à 75 % de leur chiffre annuel pendant leur semaine parisienne. L’autre, tout aussi parlant, est celui du taux de reconduction des marchands qui avoisine les 95 % ces dernières années. Cela montre l’importance, mais aussi le sérieux de notre événement.