Palos Verdes, 12 février 2020
Il a la passion du collectionneur et la rigueur de l’ethnologue. Depuis plus de vingt ans, le marchand d’art américain Michael Hamson célèbre la créativité des arts traditionnels du Pacifique sud.
De la Nouvelle Guinée aux Îles Salomon, du Vanuatu à la Nouvelle Calédonie, des centaines d’œuvres de qualité muséale sont passées par ses mains. De son aveu, rien ne le prédestinait pourtant au commerce de l’art tribal.
À la fin des années 80, cet ancien navigateur, surfeur en quête de belles vagues à ses heures, profite de ses longs mois à terre pour voyager, d’abord en Afrique de l’Ouest où il découvre l’art tribal, puis en Papouasie Nouvelle Guinée. Là bas, il rencontre un biologiste qui menait ses recherches dans des villages isolés autour de Maprik, le centre de la culture Abelam. Une révélation. « Lors de mon premier voyage, j’ai découvert la Nouvelle Irlande et j’ai suivi le cours du fleuve Sepik. Bien entendu, je ne suis pas tombé tout de suite sur des antiquités, mais les objets que j’ai trouvé, à défaut d’être anciens ou de belle facture, avaient la qualité d’être authentiques. Le feu qui s’était allumé en moi est devenu un brasier. »
Il se donne alors pour mission de marcher pendant des semaines jusqu’à des villages où aucun collectionneur de terrain n’avait jamais mis les pieds. Parmi ses premières trouvailles, un ancien masque de l’île Vokeo – dont il apprendra par la suite la valeur – le convaincra de se consacrer exclusivement à sa passion nouvelle. « J’ai eu plusieurs métiers dans ma vie : j’ai été officier de marine, j’ai fait une école de cuisine à Paris, j’ai étudié le journalisme à San Pedro et même le massage thérapeutique à San Diego. Mais c’est avec l’art océanien que j’ai trouvé ma passion et ma place dans ce monde. »
Il décide alors de se doter d’un bagage universitaire. Si l’anthropologie semble un choix naturel, c’est finalement vers l’histoire de l’art qu’il décide de se tourner. Tout en poursuivant sa collecte de terrain en Nouvelle Guinée, il suit le cursus dans le domaine de l’art africain et océanien à l’université de Californie à Santa Barbara sous la direction d’Herbert Cole et repart en 1998 avec un master sur la culture Abelam en poche.
« À l’époque, je ne connaissais absolument rien au marché de l’art. J’ai fait mes débuts l’année suivante lorsque j’ai participé pour la première fois à la foire d’art tribal de San Francisco. J’ai alors pris conscience que j’avais de beaux objets, mais aucune idée de leur valeur. » Pour se rôder, il se frotte à l’univers des salles de ventes, visite les foires et commence à vendre à des marchands réputés. « Certains de mes clients ont commencé leur collection d’art océanien avec moi. Aujourd’hui, ce sont devenus des amis qui me suivent toujours. » Désormais, l’expertise de Michael Hamson repose aussi bien sur sa connaissance du terrain que sur celle du marché, exclusivement celui des arts du Pacifique Sud, même si son goût personnel l’attire également vers l’art moderne. « Je ne me suis jamais considéré comme un esthète dont l’œil pourrait transcender sa zone d’intérêt. C’est pourquoi je m’en tiens à ce que je connais et que je me suis pas aventuré dans l’art africain ou indonésien, par exemple. »
Ayant mis de côté la collecte de terrain, Michael Hamson se consacre désormais aux pièces d’exceptions inédites sur le marché qui sont encore conservées en mains privées, tout en travaillant sur plusieurs projets à long terme d’expositions d’art océanien et de publications « substantielles ». Une activité multi-casquettes dont le modèle économique lui convient parfaitement. « Il me permet de faire de belles acquisitions en tant que collectionneur, de conduire des recherches et des publications comme le ferait un universitaire et, dans la mesure du possible, de faire du profit en tant que commerçant. »
Du 21 au 23 février prochain, Michael Hamson participera au San Francisco Tribal & Textile Art Show 2020. Parmi les nombreuses pièces présentées, une frise Malangan de Nouvelle-Irlande collectée entre 1907 et 1914 par Paul Barschdorff, un directeur d'école colonial allemand et éditeur de journaux gouvernementaux basé à Rabaul avant la première guerre mondiale.
Enfin, il prépare activement son exposition pour le Parcours des Mondes à Paris en septembre prochain dont le thème sera "Pré-contact".