New York, 8 mai 2019
Exposées à Paris du 8 au 10 avril dernier et à New York depuis le 2 mai, près de 90 œuvres d’art du Pacifique issues de la collection de Harry A. Franklin seront proposées aux enchères chez Sotheby’s le 13 mai dans le cadre de la session de printemps organisée par la maison de vente américaine.
Pionnier dans le commerce des arts d’Afrique et d’Océanie après un début de carrière dans le textile, Harry A. Franklin s’est imposé comme référence dans les années 1950-1960 et a « converti » de nombreux collectionneurs de la côte ouest des États-Unis. Sa galerie, sise à Beverly Hills, était un lieu de rencontre privilégié des anthropologues, amateurs d’art, grands voyageurs, politiciens et stars du cinéma, comme Jacques Lipchitz, Nelson Rockefeller, John Huston, Frank Sinatra ou encore Paul Newman.
Après le décès du marchand californien, en 1983 (il avait 79 ans), une première vente aux enchères, organisée chez Sotheby’s à l’initiative de sa fille, Valérie Franklin-Nordin, a défrayé la chronique en avril 1990, grâce notamment à la vente record, pour 3,4 millions de dollars, d’une statue du Cameroun, connue sous le nom de « Reine Bangwa » et photographiée par Man Ray au milieu des années 1930 à côté d’un modèle de chair d’origine guadeloupéenne.
Avant les enchères, Sotheby’s tablait sur un chiffre d’affaires compris entre 3,8 et 5,5 millions de dollars pour l’ensemble des 475 articles – présentés en 431 lots –, provenant pour plus de la moitié de la collection privée d’art africain de Franklin, et de l’entreprise familiale pour le reste... La Reine Bangwa, aujourd’hui propriété de la Fondation Dapper, était, pour sa part, estimée entre 1,2 et 1,8 million de dollars. Le marchand californien avait acquis la statue – passée notamment entre les mains du collectionneur Arthur Speyer et du marchand parisien Charles Ratton – pour 29.000 dollars en 1966, lors de la vente aux enchères de la collection d’Helena Rubinstein chez Sotheby’s Parke-Bernet, à New York. Ce record mondial marqua le début d’une nouvelle ère pour la collection des arts primitifs.
« Conservées par la famille depuis le décès de son fondateur, les œuvres d’art du Pacifique de la collection Harry A. Franklin qui seront mises aux enchères le 13 mai ne sont pas moins impressionnantes, assure Alexander Grogan, vice-président et le chef du département chez Sotheby’s. Elle comprend une vaste sélection de sculptures issues des anciennes cultures insulaires d’Océanie, notamment des œuvres de Nouvelle-Zélande et des îles polynésiennes, ainsi que de Mélanésie, en particulier de Papouasie-Nouvelle-Guinée. Parmi ces œuvres, un certain nombre ont été acquises directement par Harry Franklin lors de la légendaire vente aux enchères de la collection Rubinstein. La collection Franklin est associée de longue date à notre maison de vente. »
Masques, figurines, amulettes, mortiers, bols cérémoniaux, coffrets, crochets de suspension, tambours, pièces de mobilier peintes, proue d’embarcation et autres sculptures représentatives des traditions artistiques des nombreux peuples océaniens sont ainsi remis en lumière. Et si aucune pièce n’atteint, dans ses estimations, le sommet de la « reine » africaine, quelques-unes sont tout de même évaluées à plusieurs centaines de milliers de dollars.
C’est notamment le cas de la statue en bois et fibres de 112 centimètres d’une figure ancestrale « uli », provenant de l’archipel de Bismarck, en Nouvelle-Irlande, estimée entre 200.000 et 300.000 dollars. Un masque « tsubwan », originaire de l’île de la Pentecôte, dans l’archipel du Vanuatu, est estimé pour sa part entre 250.000 et 350.000 dollars et sera mis aux enchères à 130.000 dollars. Un ornement de pignon maori de 96 centimètres, en bois, obsidienne et pigments, présenté sur un socle de l’artiste japonais Kichizô Inagaki (1876-1951) et passé selon toute vraisemblance par la collection d’André Breton, sera proposé à partir de 260.000 dollars, pour une estimation haute établie à 700.000 dollars.
« L’apparition de la collection Franklin aux enchères représente une occasion rare pour les collectionneurs d’acquérir des œuvres inédites sur le marché de l’art depuis plus d’un demi-siècle », insiste Alexander Grogan.
La vente de la collection du Pacifique d’Harry A. Franklin sera suivie par la mise aux enchères de 142 lots d’art d’Afrique, d’Océanie et des Amériques, comprenant notamment d’importantes sculptures d’Afrique subsaharienne, des îles du Pacifique, de l’ancienne Méso-Amérique – statuaires aztèques et mayas, pendentifs et ornements précolombiens en or – et d’Amérique du Nord. Là encore, certaines pièces, issues de diverses collections privées, devraient atteindre plusieurs centaines de milliers d’euros.
« Ces ventes s’inscrivent dans le même cadre que les traditionnelles enchères dédiées à l’art moderne, impressionniste et contemporain chez Sotheby’s, célébrant ainsi les liens historiques et affinités esthétiques qui les relient aux arts de ces cultures primitives, note encore Alexander Grogan. Elles coïncident en outre avec l’inauguration de notre nouvel espace Galeries de New York, qui s’attache aussi à souligner ces correspondances. »