New York, 4 novembre 2019
C’est tout simplement la plus belle collection d’appui-têtes ethniques au monde. Le 11 novembre, la maison de ventes Bonhams s’apprête à disperser à New York la fameuse collection Graham Beck. En 2005, l’homme d’affaires et philanthrope sud-africain avait acquis cet ensemble unique d’appui-têtes africains et océaniens auprès de Jonathan Lowen, un avocat né en Afrique du Sud qui vivait à Londres.
Passionné par ces artefacts qui se font plutôt discrets dans les collections privées, ce dernier avait constitué un fonds tout à fait unique au fil des années, notamment avec des œuvres d’Afrique du Sud et du Zimbabwe. « Jonathan Lowen a commencé à collectionner des appui-têtes à la fin des années 60 lorsqu’il est arrivé à Londres, mais il avait le mal du pays », raconte Fred Backlar, l’expert de la vente qui a rencontré le collectionneur il y a quelques années. « La majorité de sa collection a été vendue à la Johannesburg Art Gallery dans les années 80. Après avoir vendu la plus grande partie de sa collection, Jonathan Lowen a repris et affiné son travail de collecte. » Sous l’impulsion de l’artiste et curateur sud-africain Karel Nel, Graham Beck lui achète toute sa collection avec l’intention de construire un musée dédié à ces objets sur sa propriété de Steenberg Vineyards au Cap. Malheureusement, il décèdera d’un cancer en 2010 avant d’avoir pu mener à bien ce projet.
Zulu, Tsonga, Shona… les 102 lots de la vente illustrent par leur variété stylistique le savoir-faire virtuose des maîtres sculpteurs sud-africains, mais aussi océaniens. Objets du quotidien ou utilisés à des fins rituelles, ces appui-têtes célèbrent la richesse, mais aussi le statut marital ou social de leur propriétaire. Au-delà de leurs fonctions utilitaires, ces appui-têtes permettaient également d’entrer en contact avec les ancêtres.
Missionné par Bonhams en 2009 pour constituer leur département d’Arts d’Afrique, d’Océanie et précolombien, Fred Backlar a jeté son dévolu sur un appui-tête Tsonga comme œuvre phare du catalogue, mais avoue avoir eu bien du mal à choisir parmi les chefs d’œuvres de la collection. « J’ai choisi cet objet (lot 56) pour la couverture et comme image “iconique” de la vente parce qu’il résonne en moi – l’équilibre, l’ancienneté, la patine, la forme, la technique et la créativité de l’artiste. Cet objet a tout simplement une âme qui parle à la mienne, comme le font souvent les grandes œuvres. »
Parmi les autres pièces remarquables de la collection figurent un appui-tête Shona du Zimbabwe (lot 28) estimé entre 30.000 et 50.000 $ ; un appui-tête Tsonga/Shangaan d’Afrique du Sud (entre 20.000 et 30.000 $) (lot 68) ou encore un appui-tête probablement Tsonga provenant d’Afrique du Sud ou du Zimbabwe méridional lui aussi estimé entre 20.000 et 30.000 $ (lot 60).
Dans la foulée de cette vacation, Bonhams proposera un ensemble d’art africain, océanien et précolombien, ainsi que des œuvres issues de la collection Richard Kelton, fondateur de la Kelton Foundation, une ONG dédiée à l’exploration maritime et ethnographique. En tout, la vente réunira 120 lots provenant d’Afrique sub-saharienne, de Polynésie, de Micronésie, de Mélanésie, d’Australie, d’Indonésie ainsi que d’Amérique centrale et latine. On y trouvera une figure Songye de République Démocratique du Congo estimée entre 40.000 et 60.000 $ ou encore un masque Biwat du Bas Sépik en Papouasie Nouvelle-Guinée (de 30.000 à 50.000 $). Clou de la vente : un rare et ancien pendentif Hei Tiki maori aussi rare qu’ancien provenant de Nouvelle-Zélande et daté du XVIIe siècle qui est évalué entre 200.000 et 300.000 $.